Le 9 janvier ou vendredi noir
C'est le 9 janvier, jour V de la crise, qui restera gravé dans la mémoire des Montréalais comme le « Vendredi noir ». La journée commence par un événement météorologique rarissime : un orage en plein hiver!
Les répartiteurs du centre de contrôle d'Hydro-Québec, qui n'ont pas encore baissé les bras, assisteront impuissants, au cours de cette journée, à l'effondrement de quatre des lignes qui relient les cinq postes de la ceinture à haute tension de Montréal. Les pylônes cèdent sous le poids de la glace et tombent en cascade sous l'effet domino, comme un château de cartes.
Il y a maintenant 1 393 300 foyers sans électricité dans la région touchée par la tempête qui dure depuis quatre jours (soit 3 millions de personnes ou près de la moitié de la Belle Province)! Devant le danger que représentent les chutes de glace, les ponts sont fermés à la circulation; le pont-tunnel Hippolyte-Lafontaine est le seul lien qui unit Montréal à la rive sud.
Montréal frôle la catastrophe totale quand ses deux usines de purification d'eau tombent en panne, faute d'électricité (Atwater et Charles-J.-des-Baillets), touchant 16 municipalités montréalaises et 1½ million d’habitants. Conséquence : deux heures d’interruption totale de service et cinq heures de tentatives de redémarrage. Le premier ministre, Lucien Bouchard, révélera plusieurs jours plus tard que les réserves d'eau étaient tombées à deux heures de consommation. Le réseau d'aqueduc était tellement fragile qu'il fallait espérer que la consommation en eau soit limitée, mais en aucun cas les hauts dirigeants n'ont voulu demander à la population de restreindre l'utilisation en eau de peur de provoquer l'effet contraire.
Selon eux, bien des gens se seraient faits des réserves d'eau, emplissant tous les contenants disponibles et même leur baignoire. Aux prises avec un nombre record d'incendies, en raison des chauffages d'appoint bricolés, l'état-major envisagera de démolir les maisons en feu avec des béliers mécaniques. Il faudra faire bouillir l'eau durant trois jours à cause de l'arrêt des opérations de désinfection.
L'effondrement, sous le poids du verglas, du réseau de transport d'électricité de la Montérégie, au sud de Montréal, déclenche un blackout total entre les villes de St-Hyacinthe, Granby et St-Jean. Ce territoire, qui ressemble à « Sarajevo sans les balles de fusil », dira le chef d'état-major, Maurice Baril, sera bientôt désigné par les médias comme le « Triangle noir ». C'est là que seront rebranchés, le 7 février - un mois et trois jours plus tard - les derniers sinistrés du verglas.
Comme en 1970, l'armée fait son apparition au Québec. « Armés jusqu'aux dents » de scies à chaines, de génératrices et de beaucoup d'autres armes, les soldats se lancent à l'assaut et cette fois au grand plaisir des Québécois.
http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/377791/verglas10-chronologie